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Je ne sais pas si c’est dans l’air du temps, je ne sais pas si c’est une question d’âge, de réalisation ou d’envie, mais j’ai faim. Avant j’avais faim d’une chose ou de deux tout au plus. Maintenant j’ai faim d’un met tout entier. Composé, varié, surprenant vivant.

J’ai faim parce que j’ai connu la famine.

Je sais c’est pas beau à dire. A l’heure ou d’autres me lisent ou m’écrivent leurs premières amours, je ne dis rien. Ils se délectent à me raconter moulte détails. Je ne dis rien parce que je les dévorent du dedans. Je les engloutis dans ma cage à mémoire. Ce lieu tenu secret où j’emmagasine des histoires d’amour, comme un biologiste range des cadavres d’animaux, si bien conservés par la main de l’homme.

J’y range donc dans un désordre qui m’est propre toutes les belles anecdotes d’amour que je peux prendre.
Je les veux avec des éclats dans les yeux, vivantes et pleines. Si le factice est si vulgaire, c’est parce qu’en amour il est si commun.

Alors je cherche ces gens. Je les sens comme on sent une espèce, avec ses tripes, son instinct, ses sens oubliés.
J’observe, je divertis, puis j’attends.
Quand les mots tombent, ceux du cœur, ceux de l’intimité que l’on protège, je me sens respectueuse.
Parce que livrer son intimité ça n’est pas rien. C’est un courage peu reconnu. C’est admirable.
J’ai cette chance, j’ai l’épaule confortable. Les hommes y déposent leurs lèvres, les autres leurs confidences.
Je vis cette situation comme une chance. Inspirer la confidence, c’est une belle distinction.

C’est en tournant entre mes doigts ces souvenirs, ceux des autres comme les miens que j’ai réalisé une chose un peu âpre. Mes dernières histoires d’amour manquaient de contenu.
Elles étaient un peu si, un peu ça mais rien de complet.

J’ai hésité.
Céline tu vieillis, il faut être sage, se résigner, se contenter de peu, s’oublier, crever à petit feu, faire bonne figure, rentrer dans le rang de la société, avoir un enfant avec un homme qui était là, c’est juste du n’importe quoi tu ne peux pas !

Depuis je ne pleure pas, j’ai faim.
J’ai faim d’un met tout entier, d’un amour beau, vivifiant, drôle à s’en tenir le ventre, sensuel à se fermer les yeux, passionnant à en parler des heures, tolérant à se sentir heureuse tout le temps.

Cette année je vais passer la Saint Valentin, seule.
Mais j’aurai faim.